Frédéric Boldrini - entretien avec le photographe
Frédéric Boldrini est un jeune photographe marseillais, mais pas seulement ! Également réalisateur, directeur artistique et graphiste, il incarne une nouvelle façon d’aborder la création artistique, sans limite et guidée par la curiosité. C’est à l’âge de 13 ans qu’il découvre sa passion pour la photographie, à Barjols, petit village du Var dont il est originaire. À la recherche de lieux inconnus et inhabités avec ses amis, il découvre d’anciennes tanneries abandonnées :
“J’étais jeune, je voulais photographier ces lieux et leur architecture pour montrer que j’étais là où personne d’autre n’était. J’étais fier de vivre ça et je voulais le partager. Mais en photographiant mes amis et l’architecture de ces bâtiments, je suis devenu sensible aux différents jeux de lumière et passionné par ce pouvoir très attractif que me donnait le téléphone.“
Lors de ses études en graphisme et signalétique, son attrait pour la création d’identité visuelle se confirme. Plus tard, poussé par les évènements et les rencontres, il se rapproche de jeunes artistes, notamment dans le milieu de la musique. Il travaille sur les différents aspects visuels de leurs projets et continue sur cette lancée en participant à des événements en tant que photographe. À ce sujet, il confie d’ailleurs :
“J’aime autant le côté intimiste que tu peux avoir avec un artiste en collaborant sur un projet, que le lien tout-public que tu ressens lors d’un concert. L’énergie de la foule, ce n’est pas quelque chose que tu peux ressentir quand tu fais partie du cercle proche de l’artiste. Dans ce contexte là, en étant face à la scène, je peux observer un artiste en tant que tel, pas juste comme une connaissance.”
À 21 ans, il se présente aujourd’hui comme créateur de contenu audiovisuel. Au fil de cette interview, je vous invite à découvrir cet artiste aux multiples facettes et plus largement le regard qu’il porte sur l’art.
Un artiste soucieux de toujours créer avec authenticité et en toute liberté
1. D’où vient cette polyvalence dans ta création ? Tu réalises aussi bien des covers que des clips vidéo, c’est une question de débrouillardise ou un désir de toucher à tout ?
“J’ai toujours eu envie de développer un maximum de techniques et d’être sur des terrains que je ne connaissais pas. Forcément, je pense qu’au départ ça passe par de la débrouillardise, parce que sur certains projets il manquait quelqu’un pour filmer ou pour s’occuper de la lumière, etc. C’est comme ça que j’ai appris à maîtriser et à aimer d’autres choses. De la débrouillardise a découlé une certaine curiosité, c’est ce qui m’a poussé à continuer. Je tiens à maintenir ce principe de polyvalence dans ma démarche. Je pense que ça ne portera jamais préjudice à mon travail, c’est une façon de le développer et de lui ouvrir encore plus de portes. Le graphisme et la photographie sont deux choses qui peuvent aussi bien se compléter, que me permettre de m’émanciper de l’un en pratiquant l’autre.“
2. C’est important pour toi de ne pas être cantonné à un seul domaine de création ?
“Oui, pour conserver de l’authenticité dans la création et ne jamais la limiter. Si tu te laisses porter, créer se fait naturellement. Aujourd’hui, à 21 ans, je m’estime chanceux de faire autant de choses différentes. Mais c’est venu à moi au fil du temps, sans avoir été envisagé au préalable. Je ne veux pas non plus homogénéiser ou unifier l’ensemble de mon travail. Je traite chacun de mes projets sans penser aux précédents, pour ne pas me limiter dans mes envies et dans ma démarche. Inévitablement une identité artistique se crée, mais mon intention d’origine n’est pas d’en avoir une qui me soit propre, au risque de m’y soumettre.“
3. Considères-tu la créativité comme quelque chose d’inné ou qui s’acquiert ?
“Je pense que la créativité est un sentiment, un caractère. On peut posséder un sens pour la créativité comme on possèderait un sens pour la gentillesse, la méchanceté ou la tendresse. Les réseaux sociaux ont tendance à nous faire penser qu’il faut l’être absolument, mais tout le monde n’a pas forcément besoin d’être créatif. Certaines choses ne s’inventent pas et c’est hyper important de garder de l’authenticité et du naturel dans les milieux créatifs. Si c’est faux, ça finira toujours par se voir. Alors que la pureté, c’est la plus belle chose possible dans une création, le plus beau cadeau que tu puisses offrir à ton œuvre. Je pense qu’un certain intérêt pour la création peut se développer au fil du temps, mais qu’il y a, dans tous les cas, une part d’inné. Tu nais avec un petit truc et puis suivant tes connaissances, suivant ton parcours, tu vas faire vivre ta créativité ou non. Moi j’ai eu la chance d’être hyper bien entouré, c’est ce qui m’a permis de la développer et j’espère le faire jusqu’à la fin de ma vie.“
La photographie comme porte d’entrée vers d’autres domaines de création
En contemplant le travail de Frédéric Boldrini et en se souvenant de comment il a commencé, on remarque l’importance de l’entourage et de la collaboration, notamment avec d’autres artistes. En discutant avec lui, c’est une démarche dont on comprend rapidement le sens. Constamment entraîné par la curiosité, c’est une nouvelle occasion de découvrir et d’être au contact de la plus large diversité artistique et créatrice possible.
4. Qu’est-ce qui te plaît dans le fait de travailler avec d’autres artistes ?
“Le milieu de la musique m’a toujours perturbé et je n’ai jamais vraiment compris pourquoi il y avait une telle barrière entre auditeurs et compositeurs. Je ne suis et ne désire pas devenir musicien, mais la photo, la vidéo et le graphisme, en bref tout ce qui contribue à la construction de l’image d’un artiste, m’a permis de faire partie de ce milieu. Collaborer avec d’autres artistes me permet d’apprendre et d’enrichir ma manière de travailler, en vérité c’est une opportunité qui ouvre un milliard d’autres portes en matière de créativité. Au départ la musique m’intriguait et aujourd’hui, ce milieu fait partie de moi. D’ailleurs, le fruit du hasard est parfois complètement fou et les meilleures rencontres sont souvent celles qui se font spontanément. Simplement en parlant avec des gens, sans envisager de travailler ensemble, des connexions peuvent se faire et c’est encore mieux que quand c’est quelque chose d’envisagé ou de prémédité, c’est plus pur.“
5. Saurais-tu expliquer cet intérêt particulier pour le monde de la musique ?
“Oui bien sûr, c’est un milieu dans lequel beaucoup de monde gravite autour des musiciens, on y retrouve beaucoup de choses et de corps de métier différents. Quand je fais un clip, je fais un peu de cinéma. Quand je travaille sur une pochette d’album, je peux me retrouver à faire un peu de dessin ou de peinture. Quand je fais des photos, on a besoin de tenues alors je me penche un peu sur la mode et je travaille avec des marques de vêtements. La musique permet de rassembler différentes personnalités et manières de créer, il y a tout un développement artistique qui se fait autour d’elle et pleins de milieux s’y mélangent. Faire partie de ceux qui sont acteurs de cela permet, plus que jamais, de ressentir cet effet d’ouverture et d’unité. C’est un art qui en réunit beaucoup d’autres et qui d’ailleurs unit aussi les gens, à l’échelle du monde et de la vie plus généralement.“
6. L’entourage occupe une place importante dans ta façon de travailler ?
“Oui, je l’ai toujours été, dans chacune de mes démarches artistiques. Même si ce n’est pas par des gens qui interagissent directement avec ce que je fais, ça a une grande importance. Les amis avec qui je faisais de l’urbex ne touchaient pas à mes photos, ils ne les critiquaient pas non plus, mais ils m’ont transmis une certaine énergie qui m’a permis de créer. J’accorde beaucoup d’importance au fait d’être en groupe ou en communauté, pour l’énergie et le sentiment qui s’en émanent.“
7. On parlait tout à l’heure de la photographie de scène, peux-tu nous en dire plus sur ce qui fait la singularité de ta démarche dans cette pratique et sur le travail que tu fais en amont pour arriver à ce résultat ?
“J’ai commencé la photo de scène après, en rencontrant et en travaillant avec d’autres artistes. Cette découverte s’est rapidement transformée en un nouveau terrain de jeu pour moi. Mon plan de pose c’est la scène, mais mon espace de travail s’étend sur toute la fosse et ce qui entoure le set de l’artiste. On aborde souvent la photo de concert comme la photo d’événementiel, avec la volonté de créer quelque chose de brut, qui retranscrit le moment et son émotion. Mais ce qui m’intéresse moi n’est justement pas de capturer l’instant, c’est sa valeur esthétique qui m’intéresse. Celle que la scène permet de transmettre et qui lui est propre. J’aborde une photographie de concert comme j’aborderais un portrait fait dans la rue ou dans un studio. Ensuite je vais me servir de ce que j’ai capturé pour le retravailler avec des paramètres colorimétriques,des contrastes et des jeux de lumière que moi j’affectionne particulièrement. C’est quelque chose que j’ajuste et façonne toujours, mais avec le temps j’ai développé une façon de faire propre à mon travail. Je conçois la photo comme un outil de création, pas de mémorisation.“
8. C’était un objectif pour toi d’aller vers quelque chose de nouveau dans cette pratique ?
“Pour la photo de concert comme en photographie plus généralement, il y a des cadrages et des retouches types, qui sont fondamentales et qu’il ne faut pas rogner. Je n’ai pas envie de casser les codes ou quoi que ce soit, au contraire, j’accorde beaucoup d’importance aux bases parce qu’elles te permettent de développer une forme de stabilité et d’aisance. Chacun a ensuite le droit de se servir de ces règles-là et d’en faire ce qu’il veut, mais tu peux te permettre de les dépasser uniquement en les maîtrisant. Ma démarche est la mienne parce qu’elle m’anime, si elle anime ensuite les autres c’est encore mieux, mais je le fais pour moi avant tout. Pour que ton travail plaise et apporte quelque chose aux autres, c’est essentiel d’aimer ce que tu fais dans un premier temps.“
9. Lorsque tu travailles sur le portrait d’un artiste, quel en est l’enjeu pour toi ?
“Tout dépend de la personne que j’ai en face de moi, du projet en question et du travail qui a été fait en amont. Mais je cherche à pousser les émotions à leur paroxysme et à faire ressentir quelque chose. Je n’ai pas pour objectif de capturer un moment, mais plutôt une émotion ou un sentiment. Le fil conducteur est toujours différent, chaque portrait est une démarche à part entière. Je n’improvise pas tout bien sûr, avant de passer à l’action on a discuté et on a une idée de quoi faire, mais il y a toujours un peu d’aléatoire dans l’art. Je ne cherche jamais à faire quelque chose de précis ou de omplètement prédéfini. C’est comme ça que j’en viens à développer de nouvelles choses et de nouvelles idées. Par contre, tu as beau avoir l’envie et la volonté de faire ressentir quelque chose de particulier, la manière dont les gens vont l’interpréter ne peut pas être pleinement maîtrisée. Tu n’as pas la main sur cette subjectivité. Mais ma volonté à moi, en tout cas, c’est de retenir une expression.“
Inspiration, frustration et discussion, tout sur sa façon de travailler et son rapport à l’image
10. Comment organises-tu la construction de tes projets ?
“On fait beaucoup de réunions, c’est à ce moment-là qu’on va fixer un lieu, des idées, une imagerie. Avec tous ces éléments on construit un storyboard, qui te permet de repartir avec des mots et des images en tête, avant même de faire vivre le projet. Le dialogue et la communication, ce sont les choses les plus importantes pour monter un projet. Pour ce qui est de mon organisation perso, je suis graphiste à temps plein donc ça passe par une bonne gestion du temps. Plus tu es organisé, mieux tu peux te reposer sur certains points sans parasiter ta création, sans pression, en restant concentré sur l’art. C’est important que rien n’interfère avec la création artistique.“
11. Comment t’es-tu tourné vers la retouche, qui amène une dimension presque surréaliste à ton travail ?
“Il y a beaucoup de photos prises sur le moment que je ne ressentais pas et qui ont pris vie parce que je leur ai accordé du temps et le bénéfice du doute. C’est en les regardant à nouveau, avec un peu de recul, que j’ai remarqué qu’elles pouvaient comporter une émotion inattendue. C’est de là que ça part, je me penche dessus et j’y pense jusqu’à y voir un truc. Tant que je ne suis pas satisfait du résultat, je modifie et retravaille l’image. Je pense qu’il y a quelque chose d 'inexpliqué dans la démarche artistique et dans ce qui aboutit à cette satisfaction. Mais en tout cas, tout n’est pas rangé et limité, on peut toujours se permettre d’aller plus loin.“
12. Qu’est-ce qui fait la qualité d’une photographie selon toi ? Tu arrives parfois à le voir dès l’instant de la prise ?
“Il y a des normes que la photographie a ramené et ramène encore de nos jours, sur le cadrage, la balance des blancs, l’ouverture, la vitesse, etc. Ce sont des choses qui font la qualité objective d’une photo. Mais pour moi une photo réussie n’est pas toujours une belle photo. Elle sera réussie quand j’aurais plus de facilité à la ressentir qu’à la définir. Carrément, il m’est arrivé plusieurs fois de cadrer quelque chose qui me semblait fou ! Il faut toujours accepter d’être pris par l’énergie du moment, la fierté n’est pas forcément quelque chose de négatif. Cette confiance là me pousse toujours à aller encore plus loin.“
13. Par le biais de la photographie, on sublime ou on rend justice selon toi ?
“Les deux, je pense que c’est un art qui permet aussi bien d’embellir que d’exposer. Au-delà de capturer des instants et de les faire perdurer dans le temps, la photographie permet surtout de les mettre en avant. Mes photos à moi sont plutôt de l’ordre du divertissement, pas de l’information comme des photos journalistiques. La photographie peut sublimer autant qu’elle peut permettre de rendre hommage ou de mettre en lumière. J’estime que c’est deux phénomènes qui ont leur place dans la photographie. On ne met jamais la photographie dans une case !“
14. Une forme d’art, un artiste qui a particulièrement influencé ta façon d’appréhender la photographie ?
“Carrément, je vais te citer Adrelanine. C’est un photographe que j’ai commencé à suivre quand j’ai commencé à faire de la photo. Il touchait à des choses que j’affectionnais particulièrement : l’urbex, la mode, la scène, etc. Il y avait dans son travail une sorte d’énergie similaire à celle que je ressentais avec mes potes, mais avec plus d’expérience.“
15. Quel est l’aspect le plus difficile de ton travail ?
“J’en ai parlé avec des potes justement, la plus grosse difficulté pour moi, ça va être la frustration. Quand je propose quelque chose, je suis très vite mécontent et insatisfait de ce que j’ai fait auparavant. Généralement, c’est quelque chose qui vient toucher une bonne partie de mes projets, sans être une question de temps : ça peut arriver sur un projet qui date de plusieurs années comme sur un projet qui date de quelques mois. On pourrait penser qu’un artiste qui revendique son art a forcément confiance en ce qu’il fait, mais la frustration peut aussi faire partie du processus créatif. Je tends à accepter d’être passé par d’autres choses, ça fait partie de ma création et de mon évolution. Avec le temps j’ai envie de refaire les choses en mieux, mais je préfère aller de l’avant en les laissant comme elles sont, surtout qu’à l’époque j’étais satisfait de cette proposition. J’estime que si je touche à ce travail là, il perdra de son authenticité et de sa pureté. En plus, si j’en viens ensuite à regretter mes retouches, c’est sans fin… Je pense que c’est la mort qui s’ensuit [rires]. Je préfère affronter ma frustration plutôt que d’essayer de revenir sur mon travail. Ces modifications et ces nouvelles envies, je les appliquerai à de nouveaux projets. À cause de cette perpétuelle insatisfaction, j’ai constamment besoin de faire ou de me tourner vers d’autres choses, mais c’est ce qui me permet d’être meilleur par la suite.“
16. À côté de cela, quel rapport entretiens-tu avec ton travail ?
“Mon travail c’est une partie de moi. C’est un peu bateau dit comme ça, mais aujourd’hui, la photographie me procure une émotion que je n’aurais jamais pu ressentir ailleurs. Pas toujours la même, ça dépend de ce que je suis en train de vivre. Mais ce sont des émotions très fortes, comme l’euphorie ou la mélancolie. L’art me permet de toucher à des parties de moi que j’aurais sûrement eu du mal à atteindre autrement. C’est ça mon rapport à la photo.“
Jeune Vision, l’association à la saveur de collectif
17. Tu fais partie de l’association Jeune Vision, qui représente et travaille sur la direction artistique de jeunes artistes, est-ce que tu peux nous en parler un peu plus ?
“Au départ on était un groupe de potes et de créateurs, on s’est dit que pour faire des événements on avait besoin de se professionnaliser et donc de monter une association. L’idée de base de Jeune Vision et qui se renforce depuis deux ans maintenant, c’était de faire de l’accompagnement d’artistes. Qui que tu sois, peu importe la manière ou ce que tu crées, notre objectif avec mes deux collaborateurs, Angelo Bessi et Baptiste Pastoureau, c’est de t’accompagner dans ta démarche artistique et dans la création de ton identité visuelle. En essayant de les comprendre, on aide de jeunes talents à se développer auprès d’autres artistes, auprès des médias et auprès du public. Au sein de l’association, on est 3 à 5 décisionnaires sur son fonctionnement et sur les démarches aussi bien administratives qu’artistiques. Et 13 artistes qui contribuent à l’accompagnement que Jeune Vision leur apporte. Moi, je suis directeur artistique et gérant de la partie communication visuelle. Le fait de faire partie de cette association m’aide beaucoup dans ma propre expérience en tant que photographe et créateur de contenu audiovisuel. La synergie qui s’en dégage est un élan.“
18. Pour finir, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?
“De garder la frustration mais d’apprendre à jouer avec elle, à l’appréhender et à la gérer. Je pense qu’elle est davantage mon alliée que mon ennemie, mais c’est un élan qui nécessite encore beaucoup de remise en question. Plutôt que d’y être soumis, j’aspire à l’accepter et à m’en servir, un juste milieu reste à trouver.“
L’art de Frédéric Boldrini est un art libre, un art aussi bien instinctif que réfléchi, qui ne naît pas toujours dès le premier coup d’œil. C’est un art jeune, nouveau, poussé par la curiosité et la soif d’apprentissage. Un art du “pourquoi pas”, sur lequel lui-même porte parfois un regard critique. Mais il se veut surtout sincère, doué d’une âme animée par la création, qui ne saurait sans doute pas faire autrement.
Merci à Frédéric Boldrini de s’être prêté au jeu de l’interview ! Vous pouvez retrouver ses autres œuvres sur Instagram et Behance.