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Piste 1 - Reboot - l'artboratoire

Piste 1 – Reboot

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Wat a come-back, m8 !

Cela fait un moment que l’on ne s’est pas croisés, vous et moi. L’artboratoire et moi, c’est une relation complexe. Un tas d’idées et projets qui se complexifient, changent, évoluent à un point où je m’oublie.

Aujourd’hui, j’aimerais bouleverser les codes que j’ai toujours imposés à « Piste 1», aux limites que je me suis dictées jusqu’à présent. Avec cette nouvelle édition, j’aimerais de nouveau palabrer sur l’écoute d’œuvres musicales à travers une question simple en apparence: Qu’attendons-nous d’un titre ?

Un titre étant différent structurellement et/ou créativement pour qu’il reste pertinent (tout d’abord en tant qu’œuvre propre mais aussi à l’univers qu’il essaye de transposer à travers la carrière d’un artiste ou d’un projet (album, EP)), c’est en cela qu’un titre peut être congruent dans le genre/univers qu’il use tout en cherchant à dépasser ces-dits codes pour arriver à s’en détacher, pour qu’il soit « unique », « propre » à lui-même, engendrant ainsi sa propre « identité » et à la création d’un nouveau chapitre dans un genre/style et à étoffer l’univers artistique du créateur du titre.

Dans les derniers articles, j’ai mis l’emphase dans mes « reviews » sur le ressenti que j’avais sur des titres que j’avais sciemment sélectionnés, une approche que je trouve toujours pertinente encore aujourd’hui mais qui a ses limites. C’est pour cela que j’ai choisi un autre point de vue ; je vais vous présenter des titres qui ont su m’imposer leur ressenti, un affect tellement fort et profond qu’ils m’ont marqués et continuent à me marquer à chaque écoute. Une démarche complexe à aborder, que j’ai encore du mal à textualiser tant elle est ancrée dans le rapport intime que chacun entretient avec la musique, une démarche purement égoïste et personnelle.

La réponse la plus facile serait de dire que ces titres ont pour point d’ancrage « le renversement des structures conventionnelles tout en basant leurs principes créatifs sur une déconstruction de ces ‘codes' » (ces derniers étant liés et sont différents selon le(s) genre(s) choisi(s) par et pour le titre ainsi que de l’expérience qu’a l’auditeur des codes en question) mais aussi d’utiliser ce principe dans un contexte purement sensitif dans le but de « marquer » l’auditeur.

Le paradigme qui en résulte, peu importe l’approche que j’en ai, c’est de répondre à une problématique par une autre, sans arriver à trouver de réelle conclusion. Par quels critères peut-on « critiquer » une telle approche quand elle est justement faite pour être subjective, égocentrée (et donc « incomparable ») ?

Avez-vous entendus parler de Twitch prime Piste 1 ?

Les titres que je vais vous présenter sont « spéciaux » car ils ont tous des défauts dont je suis conscient, bien qu’ils ne s’inscrivent pas totalement dans un genre précis et/ou une démarche conventionnelle, bien qu’ils ne sont pas non plus de purs produits « expérimentaux ». J’entends par là qu’ils ont été crées dans un but précis et ne sont pas une résultante d’un essai expérimental, ils ont sciemment été crées ainsi.

Si j’ai choisi ces titres, c’est justement car ils reflètent la complexité que l’on peut ressentir quand on s’intéresse à la musique. La musique peut être ce qu’on en fait. Plus je découvre de titres, plus je deviens perplexe quant à la limite que l’on peut imposer de façon superficielle à un titre.

Nous avons tous et toutes des parcours de vie différents, jalonnés de moments marquants, tristes ou heureux. Chaque fois que l’on choisit d’emprunter un « nouveau chemin » à travers l’écoute que l’on apporte à un inconnu, c’est l’ouverture à un univers entier, une démarche altruiste palpitante, un comportement résilient envers l’inconnu, sans être analytique ou critique, juste passer un moment. Chaque promenade permet de découvrir et comprendre une forme de subjectivité, d’adversité.

Écouter de la musique, pour moi, est une chose essentiellement intime. D’un naturel très effacé (rpz à tous les potos « papier-peint » en soirée), il m’a toujours été difficile de conceptualiser et d’exprimer mes sentiments, je n’arrive pas à me formuler mes propres sentiments alors qu’ils sont limpides pour autrui, j’arrive à les transmettre mais pas à les comprendre.

Il en résulte lorsque j’écoute un titre une vision de paysages, de visages, de nuances de couleurs, de textures ; quelque chose de très graphique. Je n’essaye pas de l’interpréter et de le formater à travers les limites du langage ; j’essaye de retranscrire cette musique à travers mes expériences passées et d’en saisir la portée sensitive à travers ma « perception » des choses. C’est en cela que j’ai décidé de regrouper les titres qui suivent entre eux, justement à cause de cette portée sensitive qu’ils partagent quand je les écoute, en groupe.


Tout ce qui va suivre ne sont que mes purs ressentis/émotions/sensations ; elles me sont propres et peuvent différer selon la personne qui les écoute donc si tu ne le ressens pas de la même manière : « git gud ».


It’s time to shine

Profondeur

Premier aspect que je vais mettre en avant lors de ce premier « bloc » avec « them » (#1), « hyaline » (#13) et « frustration » (#15), c’est la profondeur qu’ils incarnent.

Sensation de vertige dans « them », sentiment d’apaisement et de solitude que m’apporte « hyaline » ou émerveillement de l’immensité que me procure « frustration ». Ils évoquent en moi une facette en chacun de nous, ce besoin de nostalgie cotonneuse, de (s’é)puiser émotionnellement comme pour se rappeler à soi-même que l’on reste humain, intensément et profondément humain. « hyaline », je l’ai ressenti comme un moment de grâce, d’être resté sous un abri-bus pendant une pluie de fin de journée d’été, moment ahurissant de soulagement où l’on profite de l’instant présent, un chaos inextinguible ; décalage.

Quant aux deux autres, ils jouent sur la même sensation de « profondeur dynamique »: le vertige du vide et la somptuosité de l’infiniment grand. Tous deux partagent cette sensation de « basculement ». « hyaline » est à l’image d’un gundam perdu dans une nébuleuse, voguant au ralenti vers un astre à l’agonie, un celluloïd saturé sur une fractale éthérée. « frustration » est une fuite en avant, un traveling compensé laissant entrevoir un paysage désolé, flash-back surcuté.

Insouciance

Le second thème que je veux aborder avec le « bloc » suivant composé de « mariuh » (#2), « before I fall » (#10), « beyond the line » (#12) et « gondolier » (#14): insouciance.

L’exaltation candide qu’alimente « mariuh », la langueur insondable libérée par « before I fall », le frisson nostalgique que me gratifie « beyond the line » ou l’ivresse amenée par « gondolier ». Quatre titres qui parviennent à ébranler mon émotivité, des petits plaisirs coupables rappelant des moments d’innocence qu’il ne faut jamais oublier. Ce moment où la totalité de l’Univers rentre en contradiction avec nos aspirations, cet ennui existentiel d’être en permanence perdu dans l’interstice de deux mondes contradictoires. « before I fall » représente bien cette sorte d’intense commotion, ce couloir mal éclairé avec ces portes qui se déforment et se referment erratiquement, un air de Paprika dans l’air.

« mariuh » quant à lui est la réminiscence de ces moments passés à douter, d’admirer ce trou béant dans lequel on va bientôt être poussé, blotti sur mon lit à fantasmer le monde. « beyond the line », c’est la représentation même du doute, trier le passé ; cette morosité de devoir s’en aller, ces moments de solitude passés à « rallonger » ce moment, à prendre conscience de ces dizaines, centaines de paumés comme moi qui ont échoués à le stopper.

Intensité

Rencontre du troisième type, cette fois-ci avec « interlace » (#3) et « go back in time » (#20) ; intensité est le maître mot.

Cette section se rapproche énormément de la première, la différence se fait sémantiquement. Vous l’aurez remarqué si vous avez survécus jusqu’ici mais je fais énormément attention aux termes que j’utilise, de la même manière qu’une nuance technique dans un son. « interlace » à cet impact, cette qualité d’arriver à être fluide dans sa gestion du rythme entre les moments doux et ceux explosifs, à la manière d’un outre-noir de Soulages sur lequel on dynamique de la couleur.

Pour « go back in time », il a cet attrait beaucoup plus « onirique » dans son intensité, il arrive à être gracieux, céleste dans son tempo tout en étant parfaitement construit au niveau de la préparation, « set-up » nécessaire à la mise en place du « drop », cette forme d’intensité parfaitement maitrisée qu’apporte ensuite le « pay-off » (concept du fusil de Tchekhov musical).

Sensualité

Quatrième catégorie composée de « what I heard » (#5) et de « timetrial » (#8), fièvre minimaliste gouvernée par la sensualité. Outre l’aspect très intimiste, voir sexuel de ces titres, ils reflètent parfaitement une structure que j’apprécie énormément dans un titre, basée sur des « vocals chops » (anglicisme utilisé dans la production musicale, usant de la polysémie du terme « chop », autant son sens commun « hacher/couper » que son sens vulgaire « techniques ». trad. stricto sensu: « bout de voix hachée ») que l’on trouve énormément dans une branche du « downtempo » dont « timetrial » est le parfait représentant, là où « what I heard » à une approche rythmique proche de la « deep house ».

Extrêmement proche de la troisième section, c’est réellement cette manière de brouiller les sens de l’auditeur pour mieux l’extraire de sa zone de confort, pour mieux l’embarquer dans ce « trip érotique psyché » qui me marque, une maîtrise technique des codes que ces musiques usent et abusent pour délimiter cette atmosphère pour mieux le piéger.

Cloisonné

Même rengaine, cinquième fenêtre sur mon esprit en compagnie de « ghost pt. 2 » (#4), « intrusive thoughts » (#6) et « headlock » (#19), cloisonné. Sentiment impromptu criblant la lassitude viscérale qu’est le quotidien.

Titres courts, percutants, incisifs, ils ont tamisé mes émotions, des stores sur la fenêtre de l’incertitude de l’inconnu et la stabilité angoissante de « l’entre-soi ». Le désenchantement lyrique de « headlock », le bilan amer de « ghost pt. 2 », le « bastion de désillusions » qu’est « intrusive thoughts ». Outre l’aspect trip hop prononcé, ces titres ont pour trait qu’ils me font ressentir cet affect de « décrépitude » de la même manière que l’une des œuvres qui m’a le plus marqué émotionnellement. Une œuvre qui m’a appris à avancer dans la souffrance comme « ghost pt. 2 », de s’affronter soi-même à la manière de « intrusive thoughts » et enfin, comme « healock », d’être prêt à mourir à chaque instant.     See you space cowboy…

Vide

Toute chose à une fin, que les titres « the world is ending but at least I have my zune » (#7), « emotions » (#9) et « the confidence you’ve lost » (#11) sont par essence, le vide.

Le genre « chill » a une résonance particulière chez-moi ces derniers mois, genre que j’affectionne tant il se rapproche dans ses fondamentales du jazz et du blues, que j’ai toujours appréciés. Après être resté enfermé chez-vous, ce ressenti d’admirer la vacuité du monde et de son existence pendant des heures, de très longues heures, n’est plus un secret pour vous: être confiné. Pour vous, cela n’a duré que quelques semaines, au pire deux mois, et alors qu’en vous sonne enfin la libération pour enfin profiter de ce printemps qui a mal débuté, en moi ne subsiste que le doux-amer sentiment de quotidien qui va se perpétuer.

La vie comme un poids à porter chaque matin semblable à la lourdeur lancinante du low-tempo de « emotion », la répétitivité morose de chaque choses telle une lassitude douloureuse de voir le temps que l’on gâche à la manière du loop cyclique de « the world is ending » et d’être enfermé, paralysé par ce cycle sans fin, épuisé et engourdi dans ce cocon de passivité, un constat lucide sur une situation désespérée, du même acabit que ce que raconte « the confidence you’ve lost », cette perte progressive de tout. Dépression, passage à vide, pressurisation ; il est temps d’enfin dépasser ce sas d’entrée.

Survivance

Paraphraser « get your wish » (#17), « stroll » (#18) et « faithless » (#21) serait mettre des barrières, littéral comme figuré, sur l’impact qu’ils ont eus sur moi ; survivance.

L’explosion libératrice de « get your wish », la vigueur décontracté de « stroll » ou la pure sensation de renaissance que m’a suscité et me procure « faithless ». Je n’écrirais pas (encore) un énième pavé sur le génie de Porter, « get your wish » est un mélange technique incroyable d’electro-pop survolté alimenté d’envolées lyriques instrumentales qui sont un parfait écho aux paroles et propos qui s’en dégagent (la difficulté d’être une idole et la force qu’il faut pour vivre avec), la fragilité est une force qu’il peut être difficile d’afficher, aussi humble soit-on ; comment avons-nous pu vivre sans Porter ces quatre dernières années.

Petite perle d’énergie, grâce à une structure mid-tempo impeccablement cyclée, une rencontre entre deux mondes différents qui arrivent, enfin, à vivre ensemble ; plénitude. « faithless » est le dernier titre du set, il regroupe la plupart des concepts techniques que j’ai explicité (« vocal chops« , « tempo management« , « set-up/pay-off« ) mais il synthétise aussi la vision et la portée sensitive que j’ai de ce parcours, un affrontement dont j’ai été prisonnier et dont « je suis » est de retour, contemplatif et réfléchi.

Briser

Mais il en reste encore « un », le plus marquant: « voice » (#16). Un titre qui arrive à percer et briser ce plafond de verre, cet « écran » entre un titre et moi-même, cette fine pellicule que j’use pour « dessiner à l’encre de mes émotions ». Un film brisant soudainement la suspension consentie de l’incrédulité, le moment où le quatrième éclate. Une prise de recul rude. Prendre conscience de soi-même dans un parfait ensemble, un dézoom violent sur ses failles, sur la totalité des échecs qui nous ont brisés dans le passé, des feuilles à présent fanées que l’on garde avec soi, souvenirs. Accepter même si c’est douloureux.

Je ne connais pas la raison qui a poussé ce titre à être produit (quand bien même qu’il existe une) mais je la comprends. Une douce brise de nostalgie mélancolique qui soudain se heurte au malaise de la réalité de ce tangible piano. Cette insouciance d’oublier que l’air nous entoure constamment et d’en prendre conscience au moment où il hurle pendant une tempête ou que l’on en manque cruellement lorsqu’on suffoque. Il nous embrasse constamment.

Et après … ?

Les titres que je vous ai présenté sont des représentations sans pareille de souvenirs que j’ai emprisonnés, un passé fantasmé que j’ai essayé d’appréhender. Au fur et à mesure de l’écriture de cet article, sur une demi-année, je l’ai et ai muri. Ce que je voulais partager avec cette édition, c’est le parcours que ces musiques m’ont permi d’acheminer. Ce chemin consistant à affronter ce passé pour me ré-ancrer dans le présent. Je reste tout de même conscient de ma situation et rien n’empêchera ces moments de revenir quoi qu’il advienne. Ces œuvres sont arrivées dans un moment de ma vie où j’avais besoin d’elles, ils ne restent à présent de ces moments que des cicatrices, que je viens pudiquement de vous retranscrire en mots.

Dans un monde qui n’assume pas sa mélancolie, confiné dans une folie morose, la seule façon pour comprendre le vague à l’âme que l’on éprouve ne serait-il pas d’abord de l’accepter pour mieux l’appréhender ?

Reboot accompli.

Restez ouvert aux rêves, vous en ressortirez lucide.

The longest journey is over.

XOXO H.


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