Personnages fantastique : l'univers de Charlie Bowater
Charlie Bowater, une jeune illustratrice anglaise, affectionne un style particulier mêlant visages, rêves et fantastique. Visite guidée de cet univers unique en son genre !
Je m’étalerai davantage sur l’ambiance particulière dégagée par ces illustrations un peu plus bas. En attendant…
Méthode et technique
Charlie Bowater a la gentillesse de poster une partie de son processus créatif sur sa chaîne YouTube. Vous pouvez ainsi, si vous êtes motivés, la regarder créer durant plusieurs heures, sans accélération, et apprécier chaque détail. Edition 2024 : apparemment, ses vidéos ne sont plus accessibles. A la place, retrouvez une heure de processus venant d’une autre chaîne :
Analysons rapidement la méthode de l’artiste : elle commence par des aplats génériques gris, plaçant les formes principales du personnage, accompagnées d’une esquisse générale du décors. L’idée est ici de définir la composition globale de l’illustration. On note qu’elle dispose très tôt un calque servant de repère, l’aidant à gérer la perspective de son dessin.
Ensuite, elle se focalise sur le visage, sur l’expression du sujet. Lorsque celui-ci est correctement représenté, elle enchaîne sur ses habits et sa posture. Vous avez d’ailleurs remarqué qu’elle alterne l’orientation du calque principal afin de comparer les proportions selon l’axe symétrique. Comme la ligne de fuite en transparence, cette astuce permet une représentation davantage fidèle à la réalité, gommant les imperfections liées à une création produite avec une seule orientation.
Enfin, on entre dans le territoire fantastique des détails : les habits, les cheveux, le visage sont complétés, agrémentés et peaufinés par Charlie Bowate. Le décors s’immisce dans le tableau, s’appuyant sur la perspective établie plus tôt. L’illustration continue sa danse alternée, sous les (re)touches expertes de l’artiste. Et, avant leur colorisation, les différentes œuvres ressemblent à ce qui suit :
Tricherie colorée sur la dernière, certes, mais l’idée est là ! Vous noterez les différents degrés de précisions dans les coups de pinceaux pixelisés : si les masses sont globalement définies, les illustrations gagnent en détail selon l’importance de la zone en question (visages, mains…).
Imagination : liberté, rêves et mouvements
J’ai découvert Charlie Bowater grâce au hashtag #VisibleWomen, sur Twitter, promouvant initialement le travail des illustratrices BD, mais s’étant rapidement élargie à la création féminine au sens large. Je vous invite à faire un tour sur ce mot-dièse, c’est une mine d’or de créativité.
Cela dit, il est difficile de démêler exactement ce qui a attiré mon regard et m’a touché dans ses œuvres : sûrement la composition, ou la colorimétrie maîtrisée… En réalité, je pense que le mouvement, toujours en suspens, est une composante importante.
À l’image des personnages animés de Hayao Miyazaki (si, si, vous vérifierez), ceux-ci laissent leur chevelure suivre leur geste, emplir l’espace physique. Difficile d’extrapoler sur le rapport capilo-émotionnel ; je note seulement le dynamisme ajouté par le placement des cheveux dans les œuvres et leur réalisme.
Le temps semble arrêté dans un état de grâce propre à une imagination juvénile, fertile. Le personnage est surpris, regard chargé d’émotions : tristesse, résignation ou surprise pour The Untold Truth, curiosité et appréhension pour Human (interprétations non contractuelles). Vous avez peut-être noté les mains, saisies en plein vol, doigts aériens : eux aussi sont capturés dans un instantané rêveur.
Cependant, ce qui m’a marqué de prime abord dans les productions de Charlie Bowater est l’incroyable encouragement à la rêverie s’en dégageant. Le regard plonge dans un univers chatoyant et complexe, fait de légendes inconnues.
L’esprit suit un fil d’Ariane invisible jusqu’au personnage et se laisse immerger, entre un livre, une rose coupée, un moment capturé. Il dérive en rivages échoués, d’une illustration, d’un univers à l’autre. La liberté d’interprétation fabuleuse des œuvres est vertigineuse : chaque personnage a droit à son histoire, son panel d’émotions brutes et entremêlées.
Au-delà de la beauté même des illustrations, j’admire la poésie subtile qui en émane. Cette jeune fille attrapant-déposant (qui sait ?) un astre dans le ciel étoilé est d’une candide simplicité, et pourtant… Pourtant, on pourrait construire un monde entier par-delà l’illustration cristallisant l’instant.
La lumière tamisée reprend progressivement ses droits et vous clignez des yeux pour laisser vos pupilles s’habituer. Engourdi, votre esprit s’extrait lentement des mondes fantastiques de Charlie Bowater…
Qu’avez-vous pensé de cette visite guidée ? Retourneriez-vous dans les limbes ?
Si cette artiste vous a plu, vous aimerez sûrement les 4 proposés juste en dessous : digital painting, concept art et rêverie sont au rendez-vous !